On m'a toujours dit que j'étais rayonnante et que je mettais de bonne humeur tout mon entourage, car pour moi, mieux vaut rire que pleurer. J'ai toujours eu cet état d'esprit, même si je l'avoue je me suis quelque peu effondrée à la mort de mon père. Puis je me suis reprise en me disant qu'il était sans doute mieux là où il était. Je suis comme ça, et on y changera rien. Vous me prendrez sans doute pour une folle, et vous aurez raison, je l'assume, je suis folle. Pas au sens psychologique du terme bien sûr, plutôt dans le sens caractériel, qui rit de tout, s'amuse de tout, et ne pense pas aux conséquences. Disons que je profite de la vie. Généralement, je fais les choses sur un coup de tête, je vais droit au but sans m’embarrasser de complications, puis je pense aux conséquences de mes actes. Après. Parfois. On me dit aussi que je suis trop franche, que je blesse les gens, mais je n'ai jamais supporté les hypocrites, pourtant il n'y a pas beaucoup de personnes que je n'aime pas, alors je dis ce que je pense. Comme on dit, il n'y a que la vérité qui blesse, et trop peu de gens ne savent pas de quoi ils ont vraiment l'air, alors je leur rends en quelque sorte service, vous comprenez ? Comme vous venez de le voir, je suis également une spécialiste du détournement de situation pour les rendre à mon avantage. Je ne me vante pas, je le sais c'est tout, et puis c'est bien pratique. Ah oui, et une dernière chose, je suis bisexuelle. Enfin je pense, on est jamais très sûrs de ces choses-là. Peut-être suis-je entièrement lesbienne. Je n'en sais rien, mais je préfère rester ouverte à toutes sortes de possibilités, c'est bien plus amusant.

Pour le physique, je me trouve plutôt belle, enfin normale. Je me fiche totalement du regard des autres et je ne suis pas du genre à passer des heures devant un miroir, je m'habille le plus souvent avec ce qui me tombe sous la main, comme un jean et un tee-shirt. Mes cheveux sont entre le blond et le châtain clair, ils m'arrivent environ jusqu'aux épaules et je les garde le plus souvent détachés, j'adore sentir le vent marin les ébouriffer. J'ai les yeux noirs, et je suis assez musclée comme à peu près tous les habitants du District 4, en raison du temps que nous passons dans l'eau à nager et pour ma part à pêcher des coquillages. C'est tellement bon, et si joli ! Je ne suis pas très grande, environ 1 mètre 65, mais cela ne me complexe pas, je n'ai pas envie de ressembler à ses grandes perches du District 1 ou du Capitole qui se pavanent à la télé.

Je m'appelle Nora Keegan. Enfin mon vrai nom est Ashley mais je ne le supporte pas, je trouve que ça fait vraiment trop star idiote des séries qu'on voit parfois à la télé, jouées par des habitants du Capitole. Forcément, ils n'ont que ça à faire, eux. J'ai eu une enfance heureuse et des plus normales, mon père partait tous les matins en mer pêcher, parfois même je l'accompagnais, quand ma mère acceptait que je rate l'école, puis on rentrait le soir et ma mère vendait les poissons et les crustacés le lendemain, sur la grande place du District. Je passais la plupart de mon temps à ramasser des coquillages, tant pour les manger que pour décorer ma chambre, et parfois même ma mère les vendait. J'ai toujours détesté l'école, peut-être parce que je n'avais jamais plus de la moyenne, après tout je ne travaillais pas, mais ayant toujours su que je ne voudrai jamais faire d'études, où était l'intérêt ? Je profitais de la vie, à mon rythme, joyeuse et souriante. Je ne fus jamais tirée lors de la Moisson, et j'en suis bien contente. Les Jeux ne m'ont jamais vraiment intéressé, j'ai toujours eu à leur égard une sorte d'indifférence, bien que je ne veuille en aucun cas être tirée, comparé à bon nombre de jeunes Carrières de mon District. Je suis, enfin j'étais moi aussi une Carrière, mes parents m'ayant obligée à aller à l'entrainement pour que je puisse survivre au cas où le sort ne me serait pas favorable, mais le plus souvent je faisais semblant d'y aller puis je partais me promener.
Question coeur, beaucoup de personne me tournaient au tour, mais je n'avais envers eux rien de plus que de l'amitié. Puis un jour, j'ai rencontré Adrian. Je n'étais pas vraiment amoureuse de lui, nous avions seulement 14 ans, je le considérais plutôt comme un très bon ami, jusqu'à ce qu'un jour, alors que nous nous promenions sur la plage, il m'a embrassée. A partir de ce moment-là, plus rien n'a jamais été pareil. J'étais amoureuse, et ce pour la première fois. Nous passions le plus clair de notre temps ensemble, à nous embrasser, à nous promener, sans toutefois aller plus loin, nous étions trop jeunes. A l'époque, Adrian buvait déjà régulièrement, fumait beaucoup et se droguait parfois, mais cela ne me gênait pas plus que cela ne me gêne aujourd'hui.
Lorsque j'avais 15 ans, mon monde s'écroula. Mon père, qui avait absolument voulu partir pêcher en dépit de la tempête à venir n'était jamais revenu. Peut-être était-il mort. Peut-être échoué ailleurs, bien loin, là où personne n'est jamais allé. Peut-être. Cela ne changeait rien pour moi, il n'était pas là, point. Moi qui ne m'était jamais effondrée, qui avait toujours vu la vie du bon côté, j'étais irrécupérable. Je n'allais plus en cours, je passais des heures assise sur la plage, en regardant l'horizon, espérant voir apparaitre le bateau de pêche de mon père. La première personne à qui je me suis confiée fut bien sûr Adrian, et c'est lui qui me sauva, bien que ses méthodes ne soient pas tout à fait orthodoxes. Vous l'avez compris, je me suis mise à boire. A boire jusqu'à oublier. Et ainsi, petit à petit, je suis redevenue l'ancienne moi, la folle qui riait de tout sans arrêt et qui mettait le bonheur dans la vie des gens. Comme le soleil après la pluie. A une exception près, je n'avais pas arrêté de boire, et je n'ai toujours pas arrêté. En même temps lorsque Adrian est votre meilleur ami, difficile de résister. Je ne sais même pas comment j'ai fait pour tenir un an. Je me suis également mise à me droguer, de temps en temps, pour m'amuser, cependant je ne fume pas. Bref, après l'épisode de la disparition de mon père, les choses ne s'améliorèrent pas pour ma scolarité. Pendant les quelques mois où j'avais touché le fond, je n'avais pas mis un seul orteil à l'école, pas plus à l'entrainement des Carrières, et de toute façon je m'en fichais royalement. Un jour; Adrian me proposa d'arrêter. De tout planter là, d'arrêter l'école, l'entrainement, et il connaissait un bar où nous pourrions travailler, lui en tant que barman et moi en tant que serveuse. J'ai accepté. Sûrement car j'étais sous l'emprise de l'alcool, mais j'ai accepté. Et c'est une des choses les plus intelligentes que j'ai faites dans ma vie. A partir de ce jour, je passais tout mon temps en compagnie d'Adrian, au bar, sur la plage, ma mère ne se préoccupant pas plus que cela de ce que je faisais, elle avait toujours su que je n'irais pas loin dans mes études. A ce moment là, je ne savais toujours pas que j'étais en réalité bisexuelle, même si je considérais plutôt Adrian comme un très, très, très bon ami, non, c'est plus tard, dans ma seizième année, que je compris. Ou plutôt que j'ouvris les yeux. Nous étions chez lui, et il commença à vouloir aller plus loin, il ne voulait plus en rester à de simples étreintes. Moi, j'acceptais, je n'avais rien à perdre de toute manière. C'était ma première fois, alors qu'Adrian l'avait déjà fait de nombreuses fois, je le savais, il ne le cachait à personne. Ce fut amusant, certes, mais sans plus. Et c'est à ce moment-là que je compris, grâce à Adrian en quelque sorte, car il s'étonnait que cela ne me fasse pas grand chose. Cela ne le vexa pas, contrairement à ce que je pensais, il trouva cela, à mon plus grand déplaisir, extrêmement amusant.
Ainsi je sais aujourd'hui que je suis plutôt attirée par les filles, ce que mon cher ami ne manque pas de me rappeler chaque fois qu'il le peut, en me taquinant à longueur de temps. Je préfère toutefois dire que je suis bisexuelle, car c'est vrai, je veux profiter de la vie, ainsi pourquoi ne pas rester ouverte à toutes sortes d'expériences ? Choisir c'est s'ouvrir moins de portes, et puis lorsque nous avons bu beaucoup d'alcool, voire que nous sommes drogués, je ne peux dire que les petits baisers que nous échangeons me déplaisent. Il y a également une autre très bonne raison : comme je sais que la nouvelle petite amie d'Adrian, Baya Baxter, me déteste car elle sait que nous avait eu un rapport sexuel, je ne manque pas une occasion de lui rappeler que quoi qu'en dise Adrian, je ne suis pas lesbienne mais bisexuelle, c'est très amusant de la voir rager.