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«Un autre.»

______Le serveur me regarde un long moment, comme s'il me demandait du regard, si c'était vraiment une bonne idée d'en rpendre "un autre". Debout devant un évier caché par une partie du bar, il essuie ses verres dans un torchon rose bonbon tout en me dévisageant avec sans gêne. Je déteste ça. Il se prend pour qui sérieusement ? Le président ? Pfff, réveille toi, t'es qu'un banal serveur du capitol qui fait ce qu'on lui dit. Sauf là apparemment où il s'entête à ne pas vouloir me servir. Je le fixe avec un regard noir.

«J'ai dit un autre.»

______Sans haussé le ton, avec fermété. Voila comment ça marche. Il ne se fait plus prier, à croire que ses bonnes résolutions concernant ma santé par rapport à l'alcool se sont envolées. Il pose un verre de vodka à coté des quinze autres déjà présents devant moi. Je le prends et fait tourner l'alcool dans le verre. Ce mouvement en rond du liquide m'hypnotise. Comme une toupie qui tourne, tourne, tourne... et finit par tomber comme si ça n'avait jamais existé. Je me mords la lèvre inférieur et plaque le verre contre le bar. Le liquide laissent échapper quelques gouttes qui atterrissent sur mes doigts. J'appuie mes chaussure sur la rambarde de la chaise de bar et baisse la tête, les bras croisés. Je pousse un soupir d'exaspération.

«Est-ce que ça va ?»

______Je ne prends pas la peine de lui répondre, ni même de relever la tête. Il m'énerve. Il m'exaspère c'est tout, juste dans sa manière d'être, si insouciante. Il ne se rend pas compte de la chance qu'il a de ne pas voir mourir un de ses enfants dans l'arène. Cette chance incroyable et si précieuse que tous les districts espèrent un jour obtenir, il ne se rend même pas compte qu'il l'a. Il ne s'en rend même pas compte ! Je sors un grognement de colère, un "raaah !" d'énervement. Il l'interprète comme si je devais le laisser tranquille et s'éloigne de moi, mais en réalité je ne suis pas énervée contre lui. Plutôt contre sa naïveté et sa joie de vivre si... iréelle. C'est fou à quel point je pouvais lui ressembler, trois ans auparavant. Quand je n'avais pas vécu l'arène. C'est étrange de se dire qu'en ce moment même, des jeunes, de quasiment mon âge revivent la même chose que moi, de se dire qu'il y a exactement trois ans, j'étais à leur place. Et que j'aurais pu être à la place de Céline. Oui. Céline est morte ce matin, au bain de sang. Des coups de pierre dans le visage de la part de celle du quatre.
______J'attrape le verre par automatisme et le vide d'une traite.

«Un autre»

______Cette fois ci, il ne rechigne pas. Tant mieux, je n'ai pas le moral et je n'ai pas envie de ma battre avec lui sous prétexte qu'il ne veut pas que je finisse alcolo... à supposer que ce soit son prétexte pour ne pas me servir autant de verres que je le souhaite. Dans ce cas là, merci, mais je tiens très bien l'alcool et je n'ai pas besoin d'un étudiant en boisson pour m'aider à m'occuper de ma santé. Devenir alcoolique je m'en tape, j'aurais de bonne raison au moins. Pas comme si lui par exemple devenait dépendant. Il n'aurait strictement aucun droit de le devenir, par respect envers tous ceux qui ont souffert et qui à présent se réfugient dans la boisson. Comme moi. A 21 ans... mon dieu où je vais comme ça.
______Il me tend un autre petit verre, remplie, toujours de vodka. Y'a que ça de vrai. Je le vide encore une fois, sans penser aux conséquences où même au goût. Juste par réflexe et automatisme. Au moment où je veux qu'il me reserve, la ding de l'ascenseur sonne. Je ne regarde pas mais ce son trouble mes pensées, déjà floues. Elles sont floues, mais ce n'est qu'en partie à cause de l'alcool. C'est aussi et surtout en raison de la mort. Qui plane au-dessus de moi ce soir. Mon verre vide, je me retourne, pose mes coudes sur le bar et observe l'arrivante. Elle est grande, brune, jolie, en tailleur. C'est tout ce qu'il y a de notable à première vue. Je suis persuadée de la connaitre mais sur l'instant, je ne la remet pas. Oui elle me dit bien quelque chose mais, sans doute à cause de l'alcool, je n'en sais pas plus. Elle s'assoit sur un fauteil à coté du bar, de dos à moi. De ce fait, je n'en sais pas plus sur ses activités, elle baisse la tête. Peut-être lit-elle un bouquin, peut-être est-elle juste en train de vagabonder dans ses pensées ... je n'en sais rien. Par politesse, curiosité ou tout simplement à cause des effets de la boisson, je lui lance :

«Je vous offre quelque chose ?»

______Elle se retourne vers moi. Je ne saurais dier si elle est étonné ou au contraire, si elle s'y attendait. Je vois flou. Bizarre, d'habitude je supporte bien les effets de l'alcool ... En même temps après dix-sept verres de vodka, on peut s'attendre à des effets secondaires...

______La jeune femme se lève, un léger sourire aux lèvres et vient s'installer sur une haute chaise, voisine de la mienne. Elle pose un coude sur le bar et se tourne vers moi pour me parler. Elle a l'air tout à fait respectable dans son tailleur gris perle et ses escarpins assortis. Les cheveux lâchés mais bien coiffé, une élégante parure aux coup doigts et oreilles et bien sur, un sourire charmeur et presque naïf au coin des lèvres. On dirait qu'elle ne traine pas souvent dans les bars. Ça devrait être aussi mon cas d'ailleurs, c'est moi qui suis hors normes. Elle à l'air plutôt sympathique et souriante. J'aime les gens souriants. Je démarre notre conversation avec un à priori positif. Elle me remercie et me pose des question :

« Merci, c’est gentil de votre part. Un Jus d’ananas. Cela fait longtemps que vous êtes ici ? Vous êtes du coin ou de passage pour les jeux ?»

______Je hausse les sourcils. Un jus d'ananas ? Elle rigole ou ... alors que je veux lui pose la question, elle enchaine :

« Veuillez m’excuser, mes tributs sont dans l’arène, donc je suis un peu sur les nerfs ces temps-ci. Je ne voulais pas me montrer indiscrète.»

______A ces mots, ma mémoire floue me revient comme une courant d'air en pleine figure. Cette fille, c'est le mentor du huit, Dalia. Dalia Lisy. Comment ai-je pu oublier une telle figure des jeux ? Elle a gagné la 5ème édition des jeux, j'avais 12 ans quand je l'ai regardé à la télé. Je l'avais soutenu tout du long et au final quand elle avait gagné, j'avais explsé de joie. J'ai eu la ... disons chance de la rencontrer brièvement lors de mon passage dans les jeux. Mais je ne lui ai jamais parlé, même après ma victoire. Trop innaccessible ou bien pas d'occasion en tout cas, nous n'avons jamais pris contact. Si je m'étais souvenue que c'était elle il y a une minute, je ne l'aurais probablement pas interpellé de cette manière. Déjà qu'en temps normal je ne réfléchis pas trop avant de parler, sous l'effet de l'alcool ... j'imagine même pas ce qu'il pourrait ... ce qu'il va arriver.
______Je repense à sa commande. Du jus d'ananas ? Elle est pas sérieuse ? Je décide de la chambrer et avec un air rieur mais pas moqueur, je dis :

« Hmmm désolé mais je crois qu'il n'ont plus de jus d'ananas ! - Je ris mais pas vraiment fort pour ne pas passer pour la débile de service. C'est raté, elle me regarde bizarrement. Je doute qu'elle ai compris la blague. Je laisse tomber mon sourire et je reprends – Ahem, je rigole. -Je me râcle la gorge et commande sérieusement cette fois, en paraissant le plus sobre possible – Deux vodkas. -Le serveur hésite à nouveau. Il m'énerve. Je ne me prive pas de lui gueuler dessus - Maintenant ! »

______Je lui jette un regard noir pour clore l'affaire puis je me retourne vers Dalia. Elle n'a pas l'air vraiment emballée par la façon dont j'ai parlé au serveur. Je hausse les épaules l'air de dire que je me fiche royallement de ce pitoyable jeune homme et de son petit caractère sensible. Peut-être qu'elle n'a pas la même logique, que selon elle, cet habitant du capitol à droit à un minimum de respect. A vrai dire je me fiche de ce qu'elle pense de moi et de mon attitude. Déjà envers le serveur et ensuite par rapport au fait que je me bourre la gu*ule comme une véritable alcolo. C'est sur que ce dernier point, elle n'a pas l'air de le faire souvent
______Le serveur pose deux petits verre sur la table, un devant moi et l'autre devant le mentor du huit. Je décide de repenser à ses questions. Elle ne sais pas que je suis mentor, elle ne me reconnait pas. Pourtant, je suis persuadée qu'elle m'a vu lors de mon édition. Enfin... en y repensant, ses deux tributs de mon année avaient péri au bain de sang donc il est probable qu'elle ai arrêter de regarder les jeux après leur mort. Moi je continuerai à regarder les jeux même après la mort de Céline, pour Kai cependant ... je ne sais pas qu'elle aurait été ma réaction s'il avait été tué au bain de sang. A cette pensée, je secoue légèrement la tête en plissant les yeux, comme pour chasser cette idée de mon esprit. Elle se demande certainement ce qu'il me prend. En fait je n'en sais rien. Je ne me sens pas dans mon état normal. Je réponds néanmoins en toute franchise à ses questions :

«Pour répondre à vos question, ça fait une semaine que je suis là. Je suis là pour ... les jeux. Comme tout le monde dans cette résidence je suppose. -Je m'arrête un instant. Dois-je lui dire que je suis un mentor ? Dois-je attendre qu'elle s'en rende compte toute seule. J'ai bien envie d'essayer de lui faire deviner tout d'un coup... Un sourire narquoi se déssine sur mes lèvres. Mes paupières se font tout d'un coup lourdes mais je résiste. - A votre avis, suis-je hôte, styliste, mentor, du personnel ? -Je la laisse chercher quelques secondes. Je porte un chemisier noir en soie, manches retroussées et une jupe pourpre qui me descends au niveau des genoux. J'ai des talons compensés noirs aux peids et les cheveux noués en ce qui semble avoir été un chignon. Avec une telle apparence, je pourrais être toutes ces propositions. Je décide de mettre fin à sa recherche bout de deux ou trois secondes - Oh je suis sûre que vous allez trouver si je vous dis que je sais paarfaitement ce que vous ressentez quand vous dites que vous êtes tendu de savoir vos tributs dans l'arène.»

______A ces mots, une sorte de lueur apparait dans son regard. Mon sourire disparait de mes lèvres et je vide le verre de vodka d'une traite en plissant les yeux. Une grande sensation de chaleur m'envahit soudain. Je la regarde. Comme pour l'enfoncer (même si au fond, ce n'est pas mon intention) j'ajoute :

« C'est comme ça que ça se boit»

______Je me demande ce qu'elle épouvre envers moi à cet instant. De la pitié ? Du dégoût ? De l'horreure ? De la compassion ? Sans doute un mélange de tout ça.