Physique - Caractère

J'ai pas choisi de naître ici,
Entre l'ignorance, et la violence et l'ennui ...

Un mètre soixante, une taille menue, de longs cheveux roux tirant sur le rouge, des traits fins, une perfection physique digne des plus grandes stars du Capitole. Si seulement Ombre avait suivi la route que lui offrait la vie, qu'on avait tracé devant elle … Au lieu d'aller faire quelque connerie que ce soit ! Enfin. La jeune fille ne possède plus rien, aucun signe distinctif qui pourrait permettre de la repérer. Si on retire le fait que beaucoup connaisse son histoire et par la même occasion son visage. D'ailleurs, parlons de celui-ci ! Encadré par une chevelure rousse flamboyante, il paraît bien pâlot. Néanmoins, ses traits sont agréables à regarder, bien qu'ils ne bougent que peu et sont souvent figés dans un masque de froideur imperturbable. Ses yeux, bleus tirant sur le gris, furètent toujours à droite à gauche, à la recherche de la moindre information, du moindre mouvement. Eux seuls animent ce visage figé dans une faille spatio-temporelle. Ses lèvres ne se mouvent plus. Elles forment un simple trait. Pourtant, en les laissant dessiner un petit sourire d'elles-mêmes, Ombre paraîtrait nettement plus jolie et heureuse … Pour ne rien arranger, la jeune fille doit à présent s'habiller seulement de gris. Couleur neutre par excellence. Avant, son père lui confectionnait toute sorte de tenues plus colorées et plus parfaites les unes que les autres. A présent, son placard est rempli de jupes, de chemisiers, de pantalons et de chaussures grises. Qu'une seule et unique couleur. Cependant, Ombre a quand même de la chance dans son malheur : le gris s'accorde à merveille à ses yeux !

Ombre a toujours eu un mal fou avec l'autorité et la soumission. Sans aucune raison, elle cherche à se rebeller, et chaque interdiction entraîne chez elle une réaction extrême. Néanmoins, elle peut se le permettre. Et oui, quand on est quelqu'un d'intelligent, rien ni personne ne nous fait peur. Surtout que la jeune fille aime cette sensation de pouvoir et de puissance, et qu'elle cerne très bien et très vite les personnalités de ses interlocuteurs. Et là, vous vous dites : Mais elle n'a que des qualités ! Non. Ombre perd son sang-froid à une vitesse impressionnante. La moindre remarque et vous avez de grandes chances de vous retrouver avec un dictionnaire, une chaise ou quoique ce soit dans la figure. Bon, comme elle a du mal à viser, souvent, ses projectiles loupent leur destinataires mais quand même … C'est un assez gros problème à gérer. Sans ça, elle parviendrait certainement à faire de grandes choses. Certes, à présent, comme étant muette, elle n'a plus réellement de liberté. Ses grands projets attendront. Ombre adore aussi trouver la petite phrase assassine. Du moins, adorait. Car sans langue, difficile de parler ! Enfin, elle a bien essayé plus d'une fois, mais sans résultat. Quelle fille têtue celle-là …. Pour finir, à part être intelligente et observatrice, elle n'a que peu de qualités. Par contre, les défauts se comptent par dizaines. En plus d'être bornée, violente, réactionnaire, la muette est froide, associable et assez agressive. Elle ne fait que peu confiance, et encore moins depuis que son ami le plus proche l'eut trahie. Elle s'est rendue compte qu'elle ne pouvait faire confiance qu'à une seule personne : Elle-même. Mais qui dit qu'elle ne pourrait pas être différente si l'on l'y aidait un peu ?

J'm'en sortirais, j'me le promets,
Et s'il le faut j'emploierais des moyens (il)légaux ...

Histoire

J'ai pas choisi de vivre ici
Entre la soumission, la peur ou l'abandon

Dix-huit ans … Dix-huit ans passés à observer, à vivre dans l’insouciance du Capitole. Ou presque. Mais il faut revenir aux débuts.
La vie nous fait parfois des cadeaux. Ombre est née au Capitole, terre de luxe et de perfection, deux ou trois ans à peine avant la révolte. Elle ne l'a connu, néanmoins, qu'à travers les récits qu'on lui apprenait. Les Districts devaient être punis, notamment les rebelles. Beaucoup se sont fait exécuter la plupart même. Mieux valait mourir plutôt que de continuer à vivre sans liberté, condamnés à même les esclaves du Capitole et de Panem.

En tout cas, c'est ce que souhaitait leur faire croire le Capitole. Néanmoins, jusqu'à douze ans, on ne se pose pas de questions. Ombre a vécu comme l'aurait vécu n'importe quel autre enfant. Elle était gâtée de beaux cadeaux à chacun de ses anniversaires, obtenait tout ce qu'elle désirait de ses parents d'un simple regard. Quoi de plus normal, ils étaient riches, et n'avaient qu'elle pour le moment. Son père travaillait pour un grand styliste. Non, pas comme ceux d'aujourd'hui. Avant, c'était les habits déjantés des femmes et hommes du Capitole qu'il créait avec ses équipes. Son talent était reconnu à travers toute la ville. Sa mère enseignait la musique à toutes les sauces, en groupe ou individuellement. Oui, Ombre est née dans une famille d'artistes. Dont la patience et le talent étaient connus. Si seulement elle avait pu être comme tous ses autres camarades et se contenter de ça …

En bref, la jeune femme eut une enfance de rêve. A part deux ou trois bagarres et un manque de discipline flagrant dès son premier jour en communauté. Jusqu'au jour où sa petite sœur arriva. Ombre avait douze ans. Et elle vit tout de suite que cette arrivée ne faisait pas partie des plans d'avenir de ses parents. Leur vie ne changea pour autant. Pour le moment. Et la petite Ambre se glissa dans leurs habitudes sans aucun problème. Tout continua de même. La roue tourne, tourne. Le temps s'échappe, ne s'arrête pas. Et la jeune fille commença à causer des ennuis. De gros ennuis plutôt. Pire qu'une gamine des Districts disaient ses parents. Au début, elle n'avait aucune cause à défendre. Elle ne supportait simplement pas la soumission. A treize ans, ça peut paraître normal. Les autorités laissèrent donc courir. Ombre ne pouvait pas les atteindre. Du moins, ils le pensaient.
Preuve d'intelligence ou non, l'enfant se plia presque aux règles après quelques remises en place. Elle redevint l'enfant modèle, la petite fille qui répond à toutes les questions, celle qui est discrète, qui n'est pas dangereuse. Les autres la laissaient aussi tranquilles, certainement parce que leurs parents leur avaient strictement interdit de l'approcher. Peur ? De toute manière, ils avaient bien raison d'agir ainsi ...

Par conséquent, Ombre fut une solitaire toute sa vie durant (Bien qu'elle ne soit pas longue). Jusqu'à ses seize ans. Elle avait continué ses études. Dans les ambitions de ses parents, elle avait décidé de devenir expert des Jeux, bien qu'elle tienne ces derniers en horreur. Tous ses gamins envoyés à la mort pour des actes qu'ils n'ont pas commis. De plus, ils avaient son âge. Entre douze et dix-huit ans. Et puis, ses camarades la trouvaient bien jeune pour être parmi eux. Néanmoins, elle leur prouva en quelques semaines qu'elle valait mieux qu'eux tous réunis. C'est bête, mais la jeune fille était certainement plus intelligente que la moyenne. Ou alors elle avait trouvé le moyen de tricher sans que personne ne s'en rende jamais compte. La ruse. Possiblement un peu des deux. Cependant, elle avait un an ou deux d'avance, il ne fallait donc pas la prendre pour plus conne qu'elle ne l'était pas. Bref, un type avait cherché à établir le contact et le lien avec elle. Reprenant ses vieilles habitudes, elle lui avait fracassé son poing sur le visage la première fois. Etre intelligente, si c'est pour perdre son sang-froid à la moindre broutille, n'a aucun intérêt.

Bon, reprenons à présent notre sujet premier. Ombre s'est donc retrouvée avec un ami, ou plutôt un petit chien au début, qui refusait de partir. Elle eut beau faire tout son possible, il restait là, debout, devant ou à côté d'elle, allant même jusqu'à la défendre devant ses anciens amis. Seconde pensée qui traversa Ombre dans ses conditions : Qui est ce fou ? Puis elle apprit à le connaître. Il se prénommait Léonard. Un joli prénom. Il venait d'avoir dix-huit quelques semaines auparavant. La jeune fille avait simplement haussé les épaules à ces paroles.
A cette même époque, peut-être à cause de lui, naquit cette idée profondément ancrée dans son esprit : la rébellion. Ombre ne pouvait s'empêcher de penser à sa sœur dès qu'elle voyait un … Tribut se faire torturer et tuer. Les Capitoliens aimaient ça. L'odeur et la vue du sang les excitaient plus que tout au monde. L’extrême étant rentré dans les normes, il leur en fallait toujours plus pour les impressionner et leur donner cette impression de pouvoir et de domination. La machine de son cerveau s'était mise en route. Rien, même la mort, ne pourrait l'arrêter.

Ombre n'en parla à personne. Pour le moment, les préparatifs étaient en cours, et tout cela n'était qu'à l'ébauche. Elle peaufina son plan une année durant. A côté, elle cherchait aussi les personnes les mieux placées, celles pour qui cette entreprise signifiait tout. Pas besoin de dégonflés. Seuls ceux qui sont sûrs de leur choix pouvaient la suivre. La jeune femme finit par en informer son plus proche ami. Celui-ci paraissait plus que partant. Tout fut mis en place pour le jour de son anniversaire, et la veille de celui de sa sœur. Tout aurait dû réussir. Le Destin en a pourtant décidé autrement.

Ce jour-là, tout dérapa. Elle n'eut pas l'occasion de faire un seul pas, d'enclencher un seul événement et piège que des menottes lui enserraient les poignets et un poignard s'était glissé sous sa gorge. Fin. Léonard apparut à ce moment-là, habillé d'un costume sobre et parfait, et accompagné d'une personne dont Ombre n'avait rien à faire. A cet instant, elle sut qui l'avait trahie. Ce type. Ce pauvre andouille … Son accompagnateur prononça une parole et ses parents furent amenés devant elle. Ils n'eurent pas le loisir de discuter car un pacificateur les exécuta froidement. La jeune femme les regarda s'écraser lamentablement sur le sol. Son visage n'exprimait rien, à part une vague inquiétude. Où était sa sœur ? L'avaient-ils aussi tuée ? Les mots que l'homme majestueux prononça se gravèrent pour l'éternité dans son esprit :

« A présent, tu auras sur ta conscience la mort de toutes les personnes présentes, celles que tu as embarquées dans ton entreprise si … Périlleuses. Elles seront toutes exécutées. Et toi, tu deviendras l'esclave du Capitole. Tout le monde connaîtra ton histoire. Et tous te haïront jusqu'à ta mort, qui n'arrivera pas avant un bout de temps ... »

Ombre n'eut le temps de commenter cette sentence. Une seringue s'enfonça dans son bras. Sa vision se troubla et son cerveau déclencha le mode "pause". On la traîna sur de longs mètres. Elle n'en eut pas conscience. Sa langue fut coupée.

Le plus dur fut le réveil. Se dire que vous n'êtes plus rien, que vous ne possédez plus rien. Les gens vous regardent avec un dégoût et un mépris permanent. Vous n'êtes plus que celle qui a tout perdu dans un idéal hors norme. En condamner un pour en terroriser un millier. Et ça a marché. Vous n'êtes qu'une muette à présent, une esclave qui n'a plus aucune liberté. Néanmoins, vous n'en serez pas pour autant discipliner. Bien au contraire. Aujourd'hui, vous n'avez plus rien à perdre. Vous pouvez donc tout tenter. Et, dans le pire des cas, vous enfoncez cette lame froide et brûlante à la fois qui se cache en plein dans votre cœur ...

Je m'en sortirai, je te le jure
A coup de livres, je franchirai tous ces murs