Mon physique. Peau métissée, cheveux châtains foncé me retombant dans le haut du dos, yeux noisettes.

Tout le monde me trouve mignonne, adorable...Et je ne voix franchement pas pourquoi. Je suis comme tous les habitants du district ; maigre à en mourir. Je suis plutôt mature pour mon âge et, malgré le fait que mes bras sont fins, ils renferment une force plutôt incroyable.

Avouons-le, je suis très nostalgique et sensible. Dès qu'une chose arrive autour de moi, je m'en inquiète, devient très soucieuse. Et surtout soulagée quand cela s'arrange. Mais il y a des fois où ça ne s'arrange pas. Et c'est là que je fonds en larme, que je me réfugie dans les pleurs.

Certains me trouveront folle, mais je voudrais parcourir tous les districts. Rapporter de l'argent, des pierres précieuses, du charbon, des meubles ou même une petit puce comportant de l'électicité à tout ceux qui en auraient besoin.

Tout ceci en une seule personne tout à fait banale...
Oh, j'oubliais. Plus tard, je deviendrais médecin.

Onze septembre, une petite fille est née. Pleurs. Rires. Et nouveaux pleurs. Mais pas pour la même raison.
Je l'ignore encore mais ma mère est morte, et par ma faute s'il vous plaît. Elle ne pourra jamais me serrer dans ses bras, pleurer quand je me rendrai sur la Grand Place pour la Moisson, rire quand je ferai une blague. Non. Car ma mère ne sera plus jamais là.

Un mois après, une femme me prend dans ses bras. Me borde pour que je m'endorme. Femme qui, je le sais à présent, m'a adoptée pour le restant de mes jours.

Mais je ne sais pas d'où je viens. Qui est ma vraie mère. Et il y a trop de travail aux champs pour que je m'en préoccupe, ce qui ne m'empêche pas, la nuit, d'imaginer son visage. Avait-t-elle des traits doux et chaleureux ou sévères et tempêtueux ? Je n'en saurai jamais rien.

Dix ans. J'ai bien grandi. Je travaille aux champs depuis trois ans, j'essaie d'être indépendante même si je suis la plus jeune. J'ai l'impression d'être une charge car tous se tuent à la tâche pour moi. Emilie, Juliana, Edith, Ethan, Erwan.

Toujours dix ans. Maman me réveille. Je ne lui en veux pas, mais lui demande pourquoi. Elle me tend une lettre. Je ne sais pas lire, alors elle la reprend. Et me la lit.
"Lucy...

J'aurais aimé te serrer dans mes bras, pleurer lorsque tu partirais vers la Grand Place pour la Moisson, rire quand tu ferais une blague. Car quand tu naîtras, je disparaîtrais. La maladie.
Mais Amy Line sera là. Elle, elle te bordera, inventera des histoires grotesques pour te faire rire. J'ai fais promettre à ton père de te lire cette lettre, lorsque tu atteindras dix ans. Tu as sûrement bien grandi. Sache que je t'aime."

La lettre est anonyme, mais j'ai commencé à pleurer dès que j'ai compris. Ma mère, ma vraie mère. Elle ne m'a pas abandonnée devant la porte de ma famille d'accueil comme dans les vieux contes, ne m'a pas lâchement abandonnée. Elle est morte. Et d'après la lettre, elle ne savait même pas que j'allais être adoptée.

J'ai douze ans. Deux ans ont passé depuis que j'ai lu la lettre. Et je pleure encore les soirs où je la relis. Car j'aurais aimé connaître ma mère. J'aurais aimé qu'elle me serre dans ses bras, qu'elle pleure quand je partirais pour la Moisson, qu'elle rie quand je lui ferais une blague. Mais elle n'est plus là.

J'ai toujours douze ans. Une étrange fille rousse toque chez notre voisin d'en face, Niko Arrow. Il n'est pas là, parti travailler aux champs. Elle se retourne et me regarde. J'en reste muette. C'est la fille rousse. Je ne me souviens pas de son nom, car je crois qu'on ne l'a jamais mentionné. Mais c'est presque une légende dans le district, car rares sont les gens de race blanche par ici.

Elle s'approche, je recule. Elle me dit son nom. Amy Line Meacher. Inévitablement, le "Amy Line" de la lettre me revient. C'est elle...? Oui, c'est elle. Car aucune autre fille de peau blanche et de cheveux roux ne porte le nom Amy Line. Enfin, aucune autre dans le district ne porte Amy Line comme nom tout court. Dois-je lui dire ?

J'ai toujours douze ans. Je ne lui ai pas dis. Elle me considère comme sa soeur, de toute manière. Elle me trouve adorable, mignonne. C'est bien la seule, car je suis plutôt grande de taille par rapport à mon âge, et mature. Mais bon, si elle le dit.
C'est le jour de la Moisson. Je m'avance. L'accompagnatrice aussi. Plonge la main dans la boule. Et tire un papier.
Lucy Manewark. Lucy Meacher, plutôt. Mais je ne dis rien. Les larmes me montent aux yeux. J'ai envie de pleurer. Je me tourne vers la foule quand je suis sur l'estrade. Un regard vers le district me suffit. Je suis prête à affronter mon destin, c'est à dire la mort.

Non. Ce n'est pas la fin. Elle s'avance. Amy. Elle crie. Elle crie qu'elle veut me remplacer. Alors que deux Pacificateurs m'empoignent, je hurle. Pas Amy. Non. Pas elle ! C'est la seule qu'il me reste. Mon père est mort. Ma mère aussi. Si je perds Amy, retour case départ, les souffrances en plus. Amy...Il ne faut pas qu'elle parte...

Nous sommes dans l'hôtel. Ils ouvrent la porte et je me précipite vers elle, lui glisse un papier dans la poche et la serre. Fort. Très fort. Et elle me dit qu'elle m'offre Jay, ce petit oiseau qui compte tant à ses yeux. Je comprends. Et je continue d'élever ce geai moqueur.

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