Physique - Caractère

Me décrire ? Je suis jolie. Et ne prenez pas ce constat pour une marque de prétention, au contraire.
À force d’entendre des murmures et des soupirs à chacun de mes passages, j’ai compris que j’étais belle, et pas que les gens m’abhorraient ou redoutaient ma présence. Le déclic ? Lorsqu’une camarade de classe m’a dit, d’un ton las : « J’aimerais tellement te ressembler, Marion… ». Dès lors, j’ai cessé de penser que seule l’intelligence permet de parvenir à ses fins. Même si ce n’est pas au goût de tout le monde…

Je suis belle, et il vaut mieux en jouer que de conserver cette beauté au fond de soi, en prévision d’un événement absolument hypothétique.
Moquez-vous si ça vous chante, je sais que cette vision des choses est la bonne. Ou plutôt : je ne doute pas d’avoir raison. Ne pas douter de ses choix, ses opinions et ses décisions, c’est tout simplement primordial. Et c’est la première chose qu’on apprend lorsque l'on doit se débrouiller seul. On se doit de respecter trois notions essentielles : perspicacité, lucidité, et confiance en soi. Vous faillez à l’une des trois, vous êtes perdu. C’est aussi simple que ça à comprendre. Et dans la pratique, c’est juste un pli à prendre.

La pire erreur que font les gens à mon sujet est de se dire : « Elle est vraiment insensible celle-là ! ».
C’est totalement faux. J’ai un degré d’empathie très faible, c’est tout. Je n’arrive plus à comprendre pourquoi untel se sent mal. J’ai besoin de vraiment bien connaître les gens pour arriver à saisir le côté dramatique d’une phrase aussi banale (à mes yeux) que :  « J’en peux plus. ».
Je ne suis pas méchante, au contraire. On me catalogue simplement trop vite. Point.

Histoire

J’ai probablement perdu toute empathie le jour de la Moisson. Je n’avais que 12 ans, et je n’avais pris aucun tesserae. Pourtant, je fus tirée au sort. À l’heure actuelle, je reposerais en paix, si une fille dont j’ignorais tout – et ce n’est pas faute d’avoir essayé de faire remonter quelques brides de souvenir… – n’avait pas pris ma place. Elle s’est portée volontaire.
Cette gamine, je ne la connaissais pas, et son geste m’a surpris, mais jamais émue.
Je ne lui suis redevable de rien, et je le souligne dès à présent.
Dans l’arène, elle est morte d’une chute. Elle escaladait un talus de pierres, puis était tombée. Nuque brisée. Fin de l’histoire.
Même si je ne la connaissais pas, ça fait quand même un petit quelque chose de voir des images d’elle, où elle sourit dans son costume. On pense inévitablement que c’est nous qui aurions dû être dans ce char, à parader. Et à mourir.
Mais j’ai vite cessé d'avoir ce raisonnement pathétique, car ça n’aurait fait que me conduire à ma perte.
Depuis cet événement, mon rapport vis-à-vis des Hunger Games est… un simple effort de cohabitation. Je n’entretiens plus aucune peur à son sujet ; j’aurais déjà dû y passer.