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Chapitre 1
► Sa philosophie de la vie, c'est qu'elle pouvait mourir à tout moment. Ce qu'il y avait de tragique selon elle, c'est qu'elle ne mourrait pas..
« Ce n’est pas ce soir, ton truc de jeunes ? »« Si, si. Ca s’appelle soirée d’intégration. »Mon père avait bredouillé un vague mot d’approbation avant de louer les bienfaits des amitiés de jeunes gens du même âge et du même district. Je ne l’écoutai déjà plus. Il s’imaginait certainement des petites soirées jeux de société et jus de fruit. Il était sacrément loin du compte. Comme tout ado qui se respecte, je m’étais bien gardée de le détromper. La soirée d’intégration était un rituel sacré, on n’y coupait pas. Ce n’était pas que j’adorais les soirées bien arrosées, non. Je n’y étais pas hostile non plus. J’étais une adolescente somme toute banale. J’étais assez solitaire et je tenais à mon indépendance. La pression du groupe ? J’ignorai ce que c’était. Lorsque quelqu’un me tapait sur le système, j’allais voir ailleurs. Je m’entendais d’ailleurs beaucoup mieux avec les garçons qu’avec les filles. La jeunesse est un monde cruel. Les filles sont peau-de-vache entre elles. Une véritable cour avec sa reine et ses ouvrières. Très peu pour moi. N’allez pas imaginer que j’étais la caricature de l’adolescente mal dans sa peau, timide et rêvant de faire partie du groupe des greluches blondes et bien foutues sans en avoir aucun des attributs. J’étais plutôt jolie fille, je n’avais pas ma langue dans ma poche et j’avais tendance à me moquer ouvertement des filles trop superficielles. Indépendance d’esprit que j’ai gardé et qui m’a toujours été bien utile.
« Et tu vas y aller…habillée comme ça ? »Je me contentais d’un haussement d’épaule assorti de cet éternel regard bovin de l’ado qui refuse de parler d’un sujet. Je me levais rapidement et après un vague salut à mes parents, je filai en direction de la maison de Jessy. Je n’ai ni frère ni sœur. C’est peut-être pour ça que je n’en ai toujours fait qu’à ma tête. Allez savoir.
« Regardez-moi ces grosses vaches. Toute cette cellulite, c’est dégueulasse. »Je savais que je n’aurai pas dû venir. Et j’en avais à présent la confirmation. Une dizaine de filles en sous-vêtements était alignée en rang à l’étage de la somptueuse demeure de Jessy, qui avait la chance d'habiter le disctric 1. Les mecs et les filles plus âgées se trouvaient au rez-de-chaussée et huaient les bizutées. Jessy, un crayon noir dans la main, entourait les zones grasses de chaque fille, l’humiliait par une réplique bien sentie sur son physique. Je me tenais accoudée à la rambarde et, contrairement aux autres, je lui faisais face. Détendue, j’avais même l’air de m’ennuyer, ce qui était le cas. Nullement gênée d’être en petite tenue, je la dévisageais du regard lorsqu’elle se planta devant moi, son petit air suffisant sur le visage.
« Et vous avez vu celle-là ? Dis-moi, Gi’, ça fait quoi d’avoir le buste d’un garçon prépubère ? »« Tu t’es fait refaire le nez, Jessy ? »Elle se toucha le nez un bref instant, tandis que mon sourire amusé commença de l’inquiéter. Elle bégaya un bref instant que non, ce n’était pas le cas. Soudain, avec violence, je lui collais mon poing sur le dit appendice qu’elle allait, de facto, devoir se refaire. Faisant face à la foule, je brandis les bras vers le ciel en signe de victoire sur l’oppresseur. Après un flottement, les gens m’applaudirent comme ils avaient applaudi quelques minutes auparavant Jessy. La masse est stupide.
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Chapitre 2
► Preuve est faite que visages dévots et pieuses actions nous servent à enrober de sucre le Diable lui-même..
« Trois bières pour la cinq ! »Je jette un coup d’œil blasé à la table où trois hommes me lorgnent d'un regard aviné. J’ai une furieuse envie de lui dire que les trois me donnent envie de gerber mais je me maîtrise. Je n'ai jamais été très courageuse. J’étais âgée de 25 ans à l’époque. Je n'avais pas fait d'études, même si j'étais loin d'être stupide. Les études, ça coûte. Et avec ma famille, je ne pouvais me le permettre. Je savais déjà ce que j’allais faire. Serveuse, comme ma mère avant moi. J'allais moisir ici, devenir une vieille fille flétrie. Sans avenir et sans but. Dans ce putain de bar. Occasion de boire, d’oublier les déboires de l’année écoulée et de rencontre l’âme sœur. On en retrouvait complètement éméchés le lendemain, dans des buissons en train de cuver.
« Eh, beauté, on se sent seuls, mes copains et moi. »Je poussais un soupir ostensiblement audible. Je nettoyais le comptoir, j’observais le ciel d’un air pensif. Je détestais ce type d'hommes mais je savais très bien jouer de mon innocence, toute relative. J’en avais envoyé plus d’un sur la paille. J’étais de toute façon cataloguée comme « la fille bizarre ». Et cela me convenait. Je n'avais qu'un seul espoir, que la Mort vienne me délivrer rapidement de cette vie misérable, miteuse et ennuyeuse.
« Allez, fais pas ta timide ! »« Fous-moi la paix, gros lard. Reviens quand t'en auras une plus grosse. »Les trois hommes grommèlent puis finissent par détourner la tête, non sans avoir lâcher des volées de noms d'oiseaux à mon endroit. Peu m'importe, j'ai l'habitude. Je me dis qu'un jour, un homme entrera peut-être dans ce bar, et que je pourrais partir loin. Pourquoi je ne pars pas seule ? Le courage, toujours le problème... J'avais eu un homme dans ma vie. Je l'avais aimé. Cinq années de vie commune et même pas un au revoir, du jour au lendemain. Je lave les verres, les pensées nichées dans mes idées morbides, avec plaisir, avec bonheur. Ce sera soit un homme, soit la Mort. Beau programme... La porte s'ouvre et un courant d'air vient me tirer de mes songes mortifères. Je tourne machinalement la tête. Un jeune homme se tenait devant moi, me regardant fixement avant de s'assoir à une table. Un je-ne-sais-quoi me pousse à l'observer. Une fureur dans ses yeux, un feu dévorant qui me rappelle celui qui m'habite jour et nuit. Je m'approche.
« Qu'est-ce que je vous sers ? »Il sourit plus largement, ce qui me surprit. Une drôle de sensation au niveau de l'estomac. Et en quelques secondes, je sais que c'est lui.
« Surprenez-moi... »« Tenez, voici notre meilleur whisky. Et la serveuse est offerte avec, si vous l'emmenez avec vous. »Il se mit à rire et un serrement de cœur inexpliqué me saisit. Allons, je n’allais pas me mettre à devenir greluche !
« Tu es bizarre comme fille.»« Si tu veux dire par bizarre, différente de celles qui minaudent et parlent torchons, je prends ça pour un compliment. »Les heures passèrent et nous restions tous les deux, à parler de tout et de rien. Je m’étais assise sur le banc et lui à côté. En fait, il n’avait rien du mec prétentieux que j’imaginai. Il était même drôle. Je suis sûre que vous voyez le tableau. Il venait de voler mon cœur. Et putain, ce que ça fait mal.
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Chapitre 3
► Quand votre vie privée se désagrégera totalement, c'est que vous aurez mérité une belle promotion !.
Je sais ce que vous vous dites. Et vous avez raison, ça s’est exactement passé comme ça. On avait la vie parfaite. Je me suis installée avec lui. Tout allait bien dans le meilleur des mondes, si on met de côté la disette. Mais le meilleur restait à venir..
« Non, mon chéri. Oh, je ne sais pas, 23h peut-être… Oui, je t’aime. A ce soir. »Je raccrochai le téléphone et me prit la tête dans les mains. Il était tard. Seuls les piliers de bar étaient encore présents. Je passais la serpillère dans tout le local, lavais les verres, et nettoyais le comptoir. J'avais encore à nettoyer les tables, ranger les chaises.
« Alors, ma grande ? Tu t’en sors ? »« Tu tombes bien, Karl. Je vais pas tarder à faire la fermeture. Tu peux mettre les soulards dehors ? »Mon patron s'en chargea avant de me souhaiter une bonne soirée et de partir. Ce n'était pas un mauvais bougre, loin de là. Je jetais alors un coup d’œil à l’horloge. Il n’était que 22h. Décidément, c’était une bonne journée. J’allais même finir plus tôt. Il me tardait de voir Adam.
Je me dirigeai plus haut dans notre rue avant de marcher d’un bon pas vers notre chez nous. Tiens, bizarre, la porte est entrouverte. Je pose la main et je pousse la porte.
« Chéri ? »Ce n’est qu’un murmure étouffé qui s’est échappé de mes lèvres, comme si j’avais pressenti ce que j’allais y trouver. Des bruits sourds me guident vers notre chambre à coucher. Et là… C’est le drame. Une blondasse tente de draper sa nudité dans mes draps. Et Adam se contente de balbutier, comme tous les crétins dans sa situation :
« Tiens Gia, c’est… C’est pas du tout ce que tu crois ! »« Ah ? Mais oui, suis-je bête ! Vous n’êtes pas du tout en train de vous envoyer en l’air, c’est une variante du scrabble mais à poil ? J’y suis ? »Ils sont tous les deux pétrifiés, semblant penser que je vais exploser et tuer quelqu’un. Mon regard s’arrête sur la blonde. Elle ramasse dare-dare ses vêtements et tente de s'éclipser. Une violente gifle l'envoie valdinguer hors de la pièce. Ca fait du bien. Putain ce que ça fait mal. Tout allait déraper en une fraction de secondes. Je ne savais même pas ce que je disais. Hurlant des horreurs sur Adam, j'avais envie de lui faire mal, de le faire souffrir. Tout est flou à présent dans mon esprit. Je me revois m'avançant menaçante vers lui et la claque qui est partie sur sa joue. Son regard enflammé au moment où il se frottais le visage. Je suis née cette nuit. J'avais tout perdu. J'avais gagné autre chose.
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Chapitre 4
► C'est seulement quand on a tout perdu qu'on est libre de faire tout ce qu'on veut..
Vous vous demandez maintenant comment j’ai atterri ici ? C’est facile pourtant. Adam a bien tenté de me parler, de m’expliquer mais il n’y avait rien à expliquer. Et rien à pardonner. L’erreur, je n’y crois pas. On est tous libre de nos choix. Mais on doit assumer les conséquences, un point c’est tout. Partir. Loin. A l’autre bout du monde, pourquoi pas. Oublier cette vie pourrie. Tirer un trait sur tout ça. Et puis disparaître. Mais c'est impossible. J'ai appris l'art de la chasse et cela me permet de me nourrir. Les Hungers Games vont bientôt commencer et je déteste ce jeu morbide, comme je déteste le Capitole. La révolte finira bien par venir. Et la suite ? On verra bien. Je finirai peut-être dévorée par la meute de loups de la forêt. Elle est pas belle, la vie ?